APPEL À LA MANIFESTATION
LE 15 DÉCEMBRE A BRUXELLES
À l’occasion du sommet européen à Laeken, plusieurs
manifestations auront lieu à Bruxelles les jeudi 13 décembre (syndicats
officiels européens), vendredi 14 (coordination d 14),
et samedi 15 (diverses organisations politiques séparées).
Le
samedi 15 décembre, plusieurs milliers d’anarchistes venus de divers pays
européens se rassembleront pour une manifestation sous des mots d’ordre propres
En effet, il ne s’agit
pas seulement pour nous de nous opposer aux nouvelles décisions qui vont être
prises, que ce soit en matière de mobilité, d’immigration ou d’enseignement,
mais de réaffirmer les valeurs sur lesquelles nous voulons fonder une nouvelle
société. Ces valeurs que nous promouvons se trouvent également sur l’affiche
jointe à ce numéro d’AL, que nous demandons à tou(te)s de coller dans un lieu
où elle puisse mobiliser le plus largement possible.
Certains groupes ou individus nous demandent
pourquoi nous ne participons pas à la deuxième manifestation de d14, qui a lieu
en même temps. Voici les raisons pour lesquelles nous appelons à un
rassemblement des anarchistes :
·
Lorsqu’est née la coordination d14, il a été convenu que le seul jour d’action
commune serait le 14 décembre, et que, les autres jours, chaque groupe développerait
les actions qu’il voulait de son côté. Notre décision de manifester seuls le
samedi a donc été prise depuis cet été. D’autres groupes membres de d14 ont
d’ailleurs annoncé qu’ils ne défileraient pas avec d14 ce jour-là parce qu’ils
avaient préparé leurs propres actions.
·
La manif d14 de samedi rencontre peu nos préoccupations car, d’une part, elle
se concentre sur le thème de la paix, et, d’autre part, elle se fera en regroupement
avec Attac et les ONG sous la bannière commune « Une autre Europe pour un
autre monde », dont la charte efface tout le contenu radical et
anti-capitaliste de notre protestation.
·
De nombreux groupes anarchistes se sentent trop éloignés de certains groupes
politiques de d14 et préfèrent manifester sous d’autres mots d’ordre.
·
Notre parcours passe par des endroits qui sont directement concernés par la
mondialisation (quartiers populaires, lieux symboliques) et permet de rejoindre
la street party organisée par le collectif BRUXXEL.
Cette manif comportera
à la fois la déclaration de nos opinions politiques par le biais des banderoles
et des tracts, et un aspect festif apporté par la musique et les chants. A ce
propos, ce serait bien qu’on soit capables d’ici là de chanter la chanson de
circonstance dont voici les paroles (sur l’air de « La mère Michel ») :
La mondialisation, la globalisation,
Les restructurations, les privatisations,
Toutes ces machinations
Ne nous disent rien de bon
Nous n’vendrons pas nos âmes
Aux multinationales
Tout pour le fric
C’est diabolique
Tout pour l’pognon
Nous résistons
Tout pour le fric
Tout pour l’pognon
Nous disons NON !
C’est ici à Bruxelles
Qu’sévit Louis Michel
Cette espèce de pion
Qui nous donne du mouron
Avec
toutes ses combines
Il nous mène à la ruine
Et ce n’est pas demain
Que tous auront du pain (refrain)
Pour plus d’égalité
Ensemble tous mirlitons
Les vues de l’OMC
Sont pas notr’ tasse de thé
Que tous ces décideurs
Qui veulent notre malheur
Sach’nt que dans l’monde ention
On résiste par millions (refrain)
Rendez-vous à 14 heures, dans le square qui jouxte le Parvis
de St-Gilles, avec drapeaux noirs, calicots, instruments de musique, …
Pour tout renseignement complémentaire : Centre
libertaire, 65 rue du Midi, 1000 Bruxelles, e-mail centrelib@anarchy.be
Réflexions
sur de nouvelles
manières
de manifester
Nous sommes tous en
train de repenser notre tactique à la lumière de la situation présente. Nous
débattons souvent des tactiques en termes de moralité - est-il juste ou
injuste, violent ou non violent, de relancer une grenade lacrymogène dans un
cordon policier ? De casser une fenêtre ?
Nous ferions mieux de
nous demander "Cette tactique soutient-elle nos objectifs?" et
"Fonctionne-t-elle vraiment ?".
Choisir une
tactique efficace
Les partisans des tactiques
très axées sur la confrontation, qu'il s'agisse de casse ou de se battre avec
les policiers, tentent généralement de porter des coups contre le système. Mais
pour l'heure, le système a reçu un coup bien plus sévère que nous ne pourrions
l'imaginer et vacille vers le fascisme, et non la libération. Dans le climat
présent, ce type d'action a toutes chances d'avoir l'effet inverse et de conforter
la légitimité du système. De nombreuses tactiques non violentes classiques sont
conçues pour renforcer le contraste entre eux et nous, pour revendiquer une
morale élevée et montrer du doigt la violence du système. Mais nombre de ces
tactiques ne fonctionnent plus comme avant. Les tactiques statiques, passives
deviennent ennuyeuses et perdent leur effet. Les arrestations arbitraires,
symboliques, ne semblent plus impressionner le public par notre noblesse de
cour et notre engagement, pour autant qu'on les remarque. Les arrestations de
masse peuvent servir à justifier la violence policière, même lorsque les personnes
arrêtées étaient complètement pacifiques. Lorsque la police coopère pour rendre
l'arrestation facile et peu risquée, le processus confirme, au lieu de remettre
en question, la puissance de l'Etat. Lorsqu'elle ne le fait pas, même les
actions symboliques se paient cher en temps de prison et de liberté surveillée.
Le prix en vaut peut être la chandelle, mais nous ne pouvons le payer qu'un certain
nombre de fois dans la vie ; nos choix doivent donc être réfléchis et stratégiques.
Il nous faut une nouvelle grammaire tactique, qui soit efficace, visionnaire,
"confrontationnelle", sans pouvoir être lue comme proto-terroriste,
et qui favorise une crise de légitimité du système.
Quelques
pistes à développer lors des prochains rassemblements
L'un des intérêts des
rassemblements de masse est l'éducation et la formation que nous avons pu
assurer les uns aux autres, des séminaires sur l'économie mondiale aux cours
d'escalade. Presque tous les Sommets ont eu leurs contre-sommets. La plupart
d'entre eux ont suivi dans les grandes lignes le format d'une conférence
conventionnelle avec des intervenants s'adressant à un public ou animant le débat.
Mais on pourrait y intégrer bien plus de manières interactives et créatives
d'enseigner et d'apprendre : jeux de rôles, conteurs, conseils. Nous pourrions
organiser une simulation géante de réunion dans laquelle les gens joueraient le
rôle des délégations et se débattraient avec les questions sur la table, mais
en partant de nos propres valeurs. Les gens ont envie de parler de la guerre,
de leurs craintes et de leurs convictions et de leurs opinions. Les Zapatistes
nous donnent l'exemple du processus consultatif qui consiste à aller vers les
gens pour tout à la fois écouter leurs
préoccupations et les mobiliser.
Nous pourrions interrompre
les discours dans les meetings pendant dix minutes pour que les gens puissent
se parler. Ou nous pourrions nous passer totalement des discours et demander à
la place à des groupes d'animer des discussions en petits groupes sur leurs
problèmes et tactiques, organiser des formations brèves, proposer des jeux, des
danses ou des
rituels. Et nous pourrions développer des moyens de créer des Conversations publiques
instantanées sous forme d'actions et d'éducation. Les caravanes peuvent
apporter la discussion et l'éducation hors des centres urbains et pourraient
représenter les énergies et les solutions de substitution, avec des moteurs
carburant à l'huile végétale, des panneaux solaires pour faire marcher les
sonos. Ce ne sont là que quelques idées qui peuvent stimuler notre réflexion et
réveiller notre créativité.
« Starhawk