Nous assistons à un tournant de
l’histoire. De la nouvelle dictature économique supranationale inaugurée
par Thatcher et Reagan, nous glissons vers ce qui est à moyen terme son
corollaire : la police supranationale, la nouvelle dictature
politique supranationale.
C’est ainsi qu’il faut comprendre
que ce qui était hier inconcevable arrive aujourd’hui : au vu et au su
de tous, les Etats-Unis transforment leur base de Guantanamo en un centre de
torture qui est sous leur seule responsabilité, et y appliquent ouvertement une
procédure pénale digne de l’Inquisition que leur Congrès a votée il y a
peu.
Amnesty, c’est dépassé.
On avait d’abord entendu une rumeur
disant que les Etats-Unis chercheraient à installer leurs camps d’exception
dans des pays du Tiers-Monde, pour les tenir à l’écart d’une initiative de
résistance de la part de leurs propres citoyens. Ensuite, on avait entendu que
des prisonniers seraient détenus à Guantanamo, Cuba. Puis, on a vu les images
qui relient la première information à la seconde. Suite à ce scandale, on
a droit à un
Les Cubains observent la base de Guantanamo de loin, du haut
d’une colline, à deux kilomètres des cages où les hommes en orange sont gardés
par les hommes en vert qui font une demi tête de plus qu’eux. Il faut
vingt-quatre heures de voyage en avion de l’Afghanistan à Guantanamo. En
voyant arriver les avions et décharger les prisonniers enchaînés, certains
à pied et d’autres sur des brancards; en entendant une fois des rafales de mitrailleuses
à l’occasion d’un de ces débarquements, les gens du cru ont eu des réactions
telles que : « D’après ce
que j’ai vu à la télévision, ces talibans sont incontrôlables et très
dangereux. La population de Guantanamo est préoccupée de les voir si près.
Pourquoi les a-t-on amenés à Cuba? Le commandant en chef a dit qu’il n’y
avait aucun problème. Moi, cela ne me rassure pas du tout. D’abord, ils peuvent
nous amener toutes sortes de maladies. Et puis Bush a dit qu’après
l’Afghanistan, il allait attaquer d’autres pays. Il y a sûrement quelque
chose derrière tout ça et Cuba est toujours sur la liste noire des Américains. »
Comme si les hommes en orange étaient des fous furieux ou des bêtes
sauvages!
En tout cas, on nous assure que l’évasion
dans le sens inverse n’aura sans doute pas lieu, car les Américains sont
devenus entre-temps des as de la sécurité. C’est présenté aux Cubains
comme une sécurité pour eux, et apparemment, du moins d’après ce qui réussit
à traverser le filtrage médiatique, les Cubains sont effectivement bien
soulagés que les guérilleros détenus n’aient aucune chance.
Ils sont bizarres, ces Cubains.
«
Cécily